Débat philosophique du 10 juin 2001 à l'Entrepot à Paris
sur le film "L'insoutenable légèreté de l'être"
Animé par Daniel Ramirez
Extraits résumés du débat
(...)
L'existence humaine est marquée par l'expérience.
Ein mal ist kein mal.
Les choses qu'on fait n'ont pas de poids, ne comptent pas.
On est dans l'inconsistance, l'éphémère.
Il faut en payer le prix pour avoir un statut.
La société se débrouille pour avoir la rétractation.
On attache du poids à ce qui n'a pas d'importance.
Ce qui est léger n'a pas besoin d'etre soutenu.
Parménide classe la légèreté dans le positif et la lourdeur dans le négatif.
Toutes ces oppositions sont illusoires.
Les véritables pensées c'est penser seulement ce qui est.
Etre c'est penser.
Le hasard fait que les choses n'ont pas de sens.
Les choses ont un sens après coup,
ce n'est pas le meme selon les personnes.
Les opposés se rejoignent.
C'est comme en physique, des forces opposées ont une résultante nulle.
On ne peut pas s'échapper le front haut mais profil bas.
Chaque etre passe par des moments de légèreté et des moments de pesanteur.
Quand il fait un choix il y a transmutation.
"Si j'avais 2 vies je ... dans l'une, ... dans l'autre.
On essaie d'échapper à son destin et on y revient.
Tout est traversé par une vision épicurienne.
Il faut modérer les plaisirs. La légèreté c'est positif mais point trop n'en faut.
Jacques : Je voudrais apporter un point de vue physique et métaphysique.
Quand un personnage dit "Si j'avais 2 vies dans l'une je ferais ceci, dans l'autre cela",
ça me fait penser à un autre film, "Smoking, No smoking" d'Alain Resnais. Ce film explore des histoires
parallèles qui se déroulent à partir de choix apparemment anodins des personnages, mais qui
changent complètement la suite des évènements.
Quand on étudie la physique quantique, on s'aperçoit que c'est peut-etre ce qui se passe effectivement.
Les particules dont nous sommes constitués
ont un comportement qui apparait comme probabiliste.
Selon l'interprétation des mondes multiples, il n'y a pas une particule qui a une certaine probabilité d'etre
dans un certain état et une autre probabilité d'etre dans un autre état,
mais un monde où la particule est dans un état et un autre où elle est dans un autre état.
Toutes les potentialités sont actualisées.
La notion de choix n'aurait alors plus de sens car tous les choix physiquement possibles
seraient effectués dans des mondes parallèles.
L'éthique s'effondre.
La seule façon de redonner un sens à la vie est de faire un pari de type pascalien.
Cette théorie peut etre fausse, et l'erreur est beaucoup plus grave dans un sens que dans l'autre.
Si on est convaincu que la notion de choix n'a pas de sens, on risque de ne plus faire d'efforts, de se laisser aller, mais si en fait la
notion de choix existe en tant qu'actualisation par notre libre arbitre d'une seule potentialité,
cette erreur est catastrophique.
Par contre, l'erreur en sens inverse n'a aucune importance.
On a donc tout intéret à faire le pari de la réalité et de l'importance de nos choix.
Daniel : La métaphore physique n'est qu'une métaphore sinon c'est une imposture intellectuelle.
Si l'espace et le temps sont infinis, il y a un moment où toutes les possibilités sont exprimées.
Une conformation donnée survient nécessairement à un certain moment en un certain lieu.
Mais toute autre conformation aussi. Et elle survient un nombre infini de fois.
C'est ce qu'on appelle la Grande Année.
Soit tout est déterminé, tout est illusoire (Parménide), ou,
selon Zarathoustra, tout est déterminé si l'instant est en bout de chaine,
mais si l'instant est au début d'une chaine infinie, chaque acte détermine une infinité de fois,
chaque instant est créateur d'éternité.
Il faudrait vivre chaque instant comme si on devait le faire une éternité.
A quel moment y a-t-il de l'etre ?
Qu'est-ce que je dois faire pour etre l'etre n'a pas de sens.
Faire comme si produit du sens.
On est toujours dans le comme si, l'etre pur est ailleurs.
C'est la réponse du Christ.
Kundera remet en question les idéaux.
La vie est souffrance.
Dans les années 50-60 les intellectuels étaient favorables à l'Union Soviétique.
Chaque fois qu'on est confronté à un choix, on est dans la lourdeur.
Il y a une variation de sa musique intérieure pour accomplir son destin dans la légèreté.