Café philo du mercredi 12 septembre 2001 au Malevitch à Paris
Sujet
proposé par Claudine : Peut-on résister au jugement des autres ? Animé par
Marie-Noëlle
Présentation On peut partir du principe qu'on n'est pas responsable de
nous. On est ce qu'on est et ce qu'on fait de nous en le projetant dans le futur
en fonction des possibilités (Sartre) Sans le regard des autres on peut se
fourvoyer. Le regard des autres nous stimule et peut nous épanouir.
Tour de table
- Il est difficile de résister au jugement des autres.
- Les adolescents veulent se différencier des autres et être en conformité.
- Lucien : Je veux de la sincérité. Je n'accepte pas le jugement des autres.
J'accepte les remarques, non le jugement car c'est une sentence.
- Christophe : Le jugement des autres n'existe pas en tant que tel, c'est
une réactivité d'une conjection. On s'attaque à la construction mentale du
supposé jugement des autres. Résister au jugement des autres est une relation
de pouvoir.
- Dominique : Je ne comprends pas cette phrase. Celui qui juge est un
imbécile, celui qui résiste aussi.
- Roland : Il y a 2 questions :
- Est-ce que les gens résistent ?
- Est-ce que moi-même je résiste ?
Les gens ne résistent pas. Non
seulement je résiste mais je l'anéantis. J'ai une machine en face. Dans le cas
de la justice, j'essaie d'embistrouquer le juge pour qu'il soit dans mon camp.
Dans les cafés philos certains arrivent à ce qu'on mette toujours leur sujet.
- Jacques B. : Certains vous jugent favorablement, d'autres défavorablement.
Il faut chercher à fréquenter ceux qui vous jugent favorablement et éviter
ceux qui vous jugent défavorablement.
- Serge : Il y a une différence entre un seul et plusieurs autres. Qu'est-ce
qu'on fait si tous ont la même direction dans leur jugement ?
- On le ressent et on en est détruit.
- Le mot jugement est assez péjoratif. Dire que celui qui juge est un
imbécile est un jugement. Tout le monde juge. On ne peut pas ne pas juger.
- Claudine : On veut être aimé. Pascal a cultivé le paradoxe. Résistere pour
préserver son authenticité, comment rester authentique ? On a besoin d'un
renvoi d'image.
- Christophe : Je ne peux pas comprendre comment tu définis l'authenticité
si tu écartes le jugement des autres.L'authenticité se fait avec le jugement
des autres.
Résumé du débat
- Myriam : Je veux faire une différence entre juger et évaluer. Juger c'est
une sanction, évaluer un rapport.
- Lucien : J'accepte l'évaluation. Le jugement induit une pensée personnelle
qu'on attibue à l'autre, l'interprétation d'un regard, je pense que l'autre
pense ceci, je juge les autres de façon incorrecte.
- Mireille : Tout le monde a pensé au jugement sur moi mais il y a aussi le
jugement sur le monde. Il faut savoir résister à une masse de jugements
orchestrée, la propagande. Intégrité de l'être pour soi et pour autrui.
- Marie-Noëlle : Il y a un conformisme social et moral, le souci du regard
des autres et la liberté, la provocation, l'autonomisation, se moquer du
regard des autres, un travail de maturation.
- Roland : Michel a dit que c'est évident qu'on juge les autres, ce n'est
pas nécessairement universel. Je ne juge personne. Je juge des actes. Les
personnes sont des amis ou des ennemis.
- Jacques B. : Je ne suis pas d'accord avec Christophe, je pense que
l'authenticité ne se construit pas sur mais contre le jugement des autres.
Elle ne s'applique pas à des jugements mais à des traits de personnalités. Ce
sont ceux qui ont résisté aux jugements des autres.
- Evelyne : On ne doit pas résister sinon on s'enferme, il n'y a pas de
communication. C'est bien d'avoir cette illusion. Est-ce que le moi, le soi
existent ? La subjectivité existe, on sent si on est soi-même ou non. Il faut
faire avec. Dans les sectes, tout le monde est très gentil, on est
dépersonnalisé.
- Claudine : Ce qui nous paralyse c'est la peur d'être jugé.
- Marie-Noëlle : De quoi a-t-on peur ?
- Serge : Qu'est-ce que le jugement ? Le jugement passe par le langage.
Est-ce que c'est possible de résister toujours ? Est-ce qu'on peut résister à
quelqu'un dont on est complètement amoureux ?
- Raymond : Dès la naissance le bébé est soumis aux impératifs des parents,
à l'école, confronté à des copains qui ont un jugement différent des parents.
L'essentiel est de se confronter dans différents groupes, contrairement aux
jeunes de banlieue.
- Christophe : Il faut se poser la question : qu'est-ce qu'on veut faire de
soi ? Ne pas prendre le soi comme quelque chose qu'on doit suivre. Le soi se
construit. Soit on admet d'intégrer la vision des autres , est-ce qu'on fait
avec, ou on rejette en essayant d'élaborer une fantasmagorie, le soi libre, on
va sur une île déserte. Tout dépend de ce que sont les images d'action qu'on
veut dans sa vie. Ne pas se conformer conduit à affirmer son ego.
- Dominique : Il faut un minimum d'exigence et de précision. Le jugement des
autres sur quoi ? Sur moi ? le monde ? Jugement singulier ? pluriel ? Comment
peut-on être certain sur quelque chose d'aussi complexe ? (...) Les
adolescents veulent séduire. Les adultes ont dépassé le cap.
- Roland : Il y a la notion de distance. Les relations serviles à la cour du
roi.
- André : Est-ce qu'on est libre ? Non, on doit s'adapter.
- Lucien : Résister, ne pas souffrir. Quand on me juge ça provoque une
souffrance. Je peux éviter de souffrir si je me pose la question : qu'est-ce
qui lui donne le droit, que cherche-t-il en me faisant souffrir ?
- Jacques B. : Je rejoins Christophe uniquement en ce qui concerne la petite
enfance : le bébé à la naissance n'a pas de personnalité. A ce moment là
seulement son authenticité est formée par les autres qui l'entourent. Le
problème se pose quand on change de milieu. Il y a une tension entre cette
authenticité et le nouveau milieu. On peut la placer où on veut :
- Etre comme un caméléon qui s'adapte à son nouveau milieu : soit on
change de personnalité et la tension est en soi entre son ancienne
personnalité et la nouvelle, soit on joue une comédie et la tension est en
soi entre sa personnalité et son comportement
- Ne pas s'adapter et la tension est à l'extérieur de soi, entre soi et
son environnement
- Intégrer un groupe qui correspond à sa personnalité : la tension est
encore plus extérieure, entre ce groupe et le reste de la société.
- Mireille : Les bébés ont une personnalité. Quelquefois on se croit
rejeté, ou accepté, alors qu'on ne l'est pas. Peut-on résister au jugement ?
En réalité c'est beaucoup plus la recherche de son propre jugement.
- Roland : On m'accuse souvent d'être provocateur, jene sais pas ce que ça
veut dire. Si on dit salaud c'est clair, je comprends.
- Myriam : Pourquoi j'accepte de souffrir de ce que les autres me font ?
- Serge : Je ne sais pas si on peut avoir une souffrance vis à vis d'un
jugement. Dans le jugement on ne cherche pas à faire souffrir.
- Christophe : c'est assez flou, comment vous pouvez définir ce que vous
êtes, ça c'est vraiment moi. J'ai du mal à comprendre. "Je refuse le
jugement des autres", aller dans tel milieu, définition de soi, c'est
dangereux. On peut dire "Je n'irai plus là", d'accord. Conserver quelque
chose de pur, de transcendant, me semble illusoire. Si je juge untel je ne
lui laisse pas la possibilité de me montrer une autre optique. Je connais
quelqu'un qui a eu une réaction de joie à ce qui s'est passé, je n'irai plus
chez lui.
- Michel : Le caméléon sur un tissu vert devient vert, sur un tissu rouge
devient rouge, et sur un tissu écossais ? Il devient fou ! On veut à tout
prix s'adapter, c'est regrettable. Il faut affirmer sa personnalité.
(...)
- Farid : Seule la vérité blesse. On ne peut pas négliger complètement le
jugement des autres. "Le premier qui dit la vérité doit être exécuté". Ca
peut être grave d'aller trop à contre-courant.
- Sohani : C'est important de se connaitre parfaitement. On accepte plus
ou moins bien le regard des autres.
- Serge : C'est un bon sujet.
- André : On ne peut pas résister au jugement.
- Claudine : Eviter le jugement des autres, faire une auto-critique. On
juge l'être, non l'acte. Eviter le jugement des autres, se remettre en
question. (...)
Prochain sujet
- Sujet choisi : 7 Roland : De quoi -t-on peur quand on déclare un
sujet tabou ?
- 3 André : Qu'est-ce qui s'est passé en Amérique ?
- 5 Myriam : Selon la sagesse orientale, "Quand l'élève est prêt, le
maître arrive.". Que peut-on en penser ?
- 2 Marie-Noëlle : La seule preuve que Dieu existe, c'et qu'l ne répond
pas.
- 2 Dominique : Si Dieu est aussi puissant peut-il créer un espace où il
n'est pas ?
- Christophe : Mener sa vie n'est-ce pas refuser les extrêmes ?
(...)