Café philo du 17 octobre 1998 au Greenwich à Bruxelles
La différence entre le duel et le dialogue.
Animateur : Olivier
Compte-rendu : Jacques
Sujets proposés :
- 1) Anne : La différence entre le duel et le dialogue
- 2) Raymond : "Le sommeil de la raison engendre des monstres" (Goethe)
- 3) Anne : Doit-on parler de l'être ou de Dieu maintenant ?
- 4) Maxime : Plutôt la conscientisation que les évangélisations
- 5) Raymond : Les gens préfèrent-ils croire ou préfènt-ils savoir ?
- 6) Anne : La philosophie doit-elle jouer le même rôle que les médias ?
- 7) L'homme a-t-il soif d'information ou de culture ?
- 8) Marc : La place de l'humour dans la philosophie
Aprè discussion, nous convenons que les sujets 4 et 5 se rejoignent
et le sujet 5 ne participe pas au vote. Au premier tour, le sujet 8 arrive
en tête avec 10 voix, ensuite le sujet 1 obtient 9 voix, et les sujets
2, 4 et 6 obtiennent 8 voix. Le Au second tour, le sujet 1 l'emporte avec 11 voix
contre le sujet 8 qui en obtient 6.
Synthèse
La principale question soulevée est : peut-on avoir un dialogue
fructueux, notamment dans un café philo ?
Le dialogue est fondamental en philosophie. Il permet d'éviter des
malentendus, d'approfondir les causes d'un désaccord, d'utiliser le cerveau de l'autre comme extension de son propre cerveau.
Cependant, le dialogue peut poser des problèmes : c'est souvent une confrontation
agressive, une lutte de pouvoir entre deux personnes qui peut durer longtemps et dont le reste du groupe est exclu.
Les moins éloquents sont défavorisés.
Afin d'éviter ces inconvénients, il conviendrait de respecter
certaines règles de bonne conduite : avoir un comportement coopératif
plutôt qu'agressif, écouter l'autre et accepter qu'il puisse avoir raison dans sa réalité,
rester dans des limites de temps raisonnables et arrêter quand ça
tourne en rond. Le respect de ces conditions permet au dialogue d'apporter
un enrichissement mutuel des idées.
Résumé des interventions
- Anne : Les grecs distinguaient le duel qui ne fait intervenir que deux
personnes, du dialogue (du grec : à travers la parole), une
parole simple mais rigoureuse échangée entre plusieurs
interlocuteurs.
Quand deux personnes entament un dialogue dans un café philo,
on entend souvent des protestations : "Pas de dialogue !".
Je suis étonnée que le dialogue soit mis à l'index
dans les cafés philo.
- Marcel : Il y a une opposition entre monologue et dialogue.
Il faut éviter la confrontation entre deux personnes qui
échappe au groupe.
- Olivier : Il y a le comportement combattif
et le comportement coopératif, qui consiste à accepter
l'autre comme différent, accepter qu'il puisse avoir raison
dans sa réalité.
Le dialogue peut être utile
pour dissiper un malentendu.
- Anne : On a peur de l'affrontement.
- Marc : Chacun doit pouvoir intervenir, participer.
- Gilles : On essaie de trouver quelle est la vraie question.
On termine en impasse parce qu'on n'a pas trouvé la réponse.
La démocratie ne doit pas être l'addition des particularités.
Il y a une complaisance à toujours rester dans le vague.
Autrefois, avant la guerre les chefs échangeaient des cadeaux.
La philosophie interroge la parole.
- André : Je suis d'accord avec Gilles.
- Georges : Autrefois, la philosophie était réservé
à des privilégiés. Les philosophes n'arrivaient
pas à trouver les réponses. Les grands philosophes
hésitent à venir dans les cafés philo de peur
qu'on leur prouve qu'ils se trompent.
- Anne, qui est professeur de philosophie, vient dans les cafés
philo, mais il faut bien faire la différence entre professeur
et philosophe.
- Jacques : Si l'autre me convainc qu'il a raison, en un sens
c'est moi qui ai gagné car j'ai utilisé son cerveau
comme extension de mon propre cerveau. Il faut accepter les dialogues
dans les cafés philo, dans des limites de temps raisonnables,
et arrêter quand ça tourne en rond.
- Olivier : Tout le monde doit pouvoir intervenir quel que soir
son niveau, son état psychologique. Certains ont du mal à
parler.
- Michel : Les nouveaux doivent pouvoir parler.
- Rosalba : Beaucoup veulent imposer leurs idées, dominer
les autres.
- Raymond : Beaucoup se laissent dominer.
- Françoise : Il faut écouter les autres, accepter ce
qu'ils disent.
- Antonio : La multiplicité des expériences fait que chacun a
sa propre philosophie. Nietzsche a soulevé ce problème
par rapport à la morale. Comment appliquer une seule morale
à tous ?
- Anne : D'abord, une remarque de forme : ici, on m'appelle Anne,
on me tutoie, mais ce n'est pas le cas des nouveaux arrivants. Le café
philo est un lieu ouvert au public. Je voudrais qu'on m'appelle Madame et
qu'on me vouvoie, qu'on me considère comme une représentante de ce
public.
Le dialogue est fondamental en philosophie.
- Maxime : A quoi sert le langage ? Selon Levinas, C'est un moyen de duel pour
agresser. Il veut dépasser ça.
Certains disent en public des choses qu'ils n'osent pas dire dans les cafés philo.
Il faut oser dire les choses dans les cafés philo.
- Madame : Le dialogue suppose qu'il y a un tiers, la langue.
Le dialogue est un conflit dans lequel une personne essaie d'avoir
raison sur l'autre. Au lieu que le public porte secours, il laisse
croupir le conflit.
- Marc : Je vais au café philo pour sortir du cadre professionnel.
- André : Il y a une opposition entre la philosophie intellectuelle et
celle qui concerne les problèmes de la vie. Pas trop de concepts.
Il n'y a pas que les philosophes grecs, il y a aussi des penseurs de ce
siècle.
- Antonio : Quand Platon a été battu en brèche,
on a retrouvé les présocratiques. La réussite de platon
est due au christianisme.
- Gilles : On ne comprend pas les cheminements.
L'expérience ne se transmet pas, c'est toujours à
recommencer.
Si on n'a pas connaissance des bornes, on ne peut pas les transcender.
- Madame : On ne transmet pas l'expérience, on doit refaire
l'expérience. Les philosophes sont ceux qui ont fait l'expérience,
qu'ils rendent publique. On ne peut pas jeter à la poubelle les
philosophes faciles à lire.
- Françoise : On peut faire de la philosophie sans les
philosophes, faire de la philosophie personnelle, de la philosophie active.
- André : Lao Tseu disait que l'expérience est une lanterne sourde qu'on porte
dans le dos.
Le "je" n'existe que parce qu'il y a le "nous".
Les problèmes bioéthiques tels que la part de génétique
et celle de vécu, qui remettent la société en
question, c'est de la philosophie.
Hume, qui parle de partage d'expérience, est contrebalançé par Kant avec
la raison.
- Antonio : Nietzsche mettait plus l'accent sur le vécu, il
avait une position anti-transcendentale, d'immanence.
On ne parle pas assez de problèmes réels, d'actualité.
- André : Qui êtes-vous ? On ne peut pas répondre
sans raconter sa vie. On n'est jamais que le résultat de son vécu.
- Olivier : Je viens au café philo parce que s'il n'y a pas d'animateur, il n'y a pas
de café philo. J'ai l'impression par moments de m'enrichir,
ressentir une large expérience vécue et connaissance.
Si je ne peux pas relier ce que je lis à ce que je vis, ça
ne sert à rien.
- Madame : Beaucoup viennent au café philo sans préparation,
il n'y a pas beaucoup de sujets proposés.
- Georges : La référence aux philosophes anciens est
importante en tant qu'opinion. J'utilise mon propre cerveau pour examiner cette opinion.
Lao Tseu devait être fatigué quand il a dit que l'expérience est une lanterne sourde qu'on porte
dans le dos. Nos expériences nous éclairent pour nous aider à avancer.
Il faut prendre l'opinion de l'autre comme point de repère.
Le dialogue nécessite la capacité de réagir tout de suite.
C'est comme un duel.
- Gilles : Pourquoi le café philo ? Pour confronter la
philosophie à ce que chacun perçoit. Le duel précè
le dialogue. Le développement de la cité implique
que le duel se transforme en dialogue. Selon Marx, qui est pour
moi le dernier philosophe, la majorité n'a pas le droit,
c'est le nous qui domine. On s'identifie comme un nous par rapport à
une collectivité. Mais à coté de ce nous il y a des je.
Ce n'est pas l'addition des particularités qui font l'universel,
la communauté.
C'est parce qu'il n'y a rien qu'il y a quelque chose.
- Marc : Il est difficile de parler face à un public
ou à quelqu'un d'agressif. Il faut pouvoir s'affirmer.
- Maurice : Le lien entre la démarche philosophique,
l'histoire de la philosophie, les concepts d'une part, et l'expérience personnelle
d'autre part, c'est d'abord la dimension d'une rencontre.
Je vais vous raconter une histoire. Un samourai rencontre un
moine et lui demande quel est le chemin de l'enfer et du paradis.
Le moine lui répond : "Qui es-tu, toi ?". Le samourai,
fàché soulève son sabre. Le moine lui dit : "Tu
n'es surement pas assez fort pour me couper la tête.".
Le samourai entame un mouvement pour lui couper la tête. Le moine dit alors :
"Ici s'ouvrent les portes de l'enfer.". Le samourai rengaine.
Le moine dit : "Ici s'ouvrent les portes du paradis."
Il faut des règles du jeu : quand quelqu'un parle, les
autres ne parlent pas.
- Maxime : La philosophie est contesté.
La philosophie est le fondement de l'entendement dans un monde
où on se sent déboussolé.
- Rosalba : Les gens bavardent et n'écoutent pas beaucoup.
Il faudrait pouvoir s'imposer sans rentrer en conflit si l'autre est
agressif.
- Marc : Face à l'agressivité, il y a trois réponses
possibles : la fuite, l'agressivité et s'affirmer tel qu'on se ressent.
- Françoise : En justice, on ne dit pas "Vous avez menti" mais
"Vous dites la chose qui n'est pas".
- Gilles : L'histoire du samourai et du moine, c'est celle du christianisme.
Il n'y a que deux alternatives : paradis ou enfer. Dans le dialogue,
une autre réponse est possible.
- Maurice : On n'est pas dans l'histoire du christianisme avec cette histoire.
Le moine ne bronche pas, il a une grande maitrise.
- Gilbert : Pourquoi toujours citer les philosophes grecs ? Comme si on niait
aussi tout le progrès. Sur quoi les grecs se basaient-ils ?
Les premiers philosophes ne pouvaient pas faire référence
à d'autres plus anciens qu'eux.
Si les philosophes grecs revenaient, est-ce qu'ils se baseraient
sur les concepts de leur époque ?
Les philosophes grecs on aussi dit des bêtises : "Les femmes
sont la réincarnation d'hommes lâches", le géocentrisme,
l'atome insécable...