Café philo du dimanche 5 octobre 2003 au Bastille à Paris
Thème : Qu'est-ce qu'un dialogue ?
Animé par Christian de Beaumont
Extraits du débat
(...)
- Serge : Est-ce qu'on va vers un déclin de la
civilisation ?
Pour pénétrer un problème le dialogue est nécessaire.
- Jacques D. : C'est une conversation entre 2 personnes. Socrate qui accouche ses interlocuteurs, un professeur qui parle à un élève, est-ce un dialogue ? Il faut qu'il y ait égalité. Un interrogatoire n'est pas un dialogue. Un dialogue peut être un échange d'informations, de sentiments, une controverse. Une polémique est un désaccord sur une personne.
- Farid : C'est un instrument de manipulation politique. Le dominant fait semblant de faire croire que tout problème vient d'un malentendu qu'on peut résoudre par le dialogue, que ceux qui protestent ont mal compris. C'est une façon d'embobiner.
- Pascal : Le voyage touristique est un échange d'opinions. Ce n'est pas un dialogue philosophique.
C'est un travail approfondi. "Toute opinion est acceptable" c'est absurde.
- Claudine : Le dialogue à 2, soi et les autres. On se révèle par le dialogue. Il désamorce l'agressivité.
- Sabine : Le dialogue uniquement avec des mots est-il possible ? Ici je vois des visages.
- Vanessa : Nous avons des prégujés : "Le dialogue est un moyen de résoudre les conflits." Dans la plupart des cas cesser le dialogue est la solution pour apaiser ou trouver une solution.
- Dimitri : Dia veut dire répandre, disperser. Le dialogue appartient plus à la rhétorique. C'est vieux comme le monde. La communication de son idée, raisonnement, sens.
- Armelle : Dia veut dire séparation.
- Marina : Un échange peut être libre. S'il n'y a pas d'échange, l'être est détaché des autres et de lui-même.
- Christian de B. : Nous sommes sous la tutelle de Socrate. Pour exister il faut être deux. Je sais que je ne sais pas. La relation à autrui n'est pas nécessairement un dialogue. Ce que signifie dans le dialogue c'est être en position d'écouter. Est-ce que je suis en position d'écouter quand chacun a un point de vue différent, prépare de son côté une réponse qui fait lien à une forme de savoir qu'il croit détenirsur la base de ce qu'il a entendu ? Est-ce que l'écoute n'est pas plutôt le non savoir ? Le dialogue ne donne pas la réponse mais l'écoute peut donner la réponse.
- Il y a des dialogues entre scientifiques. Deux extrêmes : le dialogue mathématique et le dialogue thérapeutique. Un dialogue n'est pas toujours que 2 monologues. Pour qu'on puisse croire que c'est autre chose il faut un mythe pusiiant : que dans n'importe quel lieu et circonstance, le dialogue a un caractère thérapeutique. Le psychanalyste n'est pas qu'un monologueur.
- Jacques B. : Il y a des vérités subjectives qui sont en fait incomplètes. Elles dépendent des valeurs qui dépendent des buts qui dépendent de la psychologie qui dépend du vécu individuel. Même les vérités objectives sont appréciées en fonction du vécu.
Concernant ce que disait Sabine, l'importance du visage dans le dialogue, c'est vrai que quand on tape un texte sur un clavier c'est facile de cacher ses sentiments. Sur son visage c'est plus difficile. La question est : doit-on être ouvert ou ne livrer que ce qu'n veut ?
C'est comme quand dans un repas quelqu'un offre du vin, si on refuse c'est mal vu, on se dit "celui-là il a quelque chose à cacher", comme dit le proverbe "in vino veritas". L'idéal du dialogue serait-il de parler en étant branchés à des détecteurs de mensonge ?
- Jacques D. : dia signifie 2, l'un et l'autre, disperser, séparer, à travers. Ca montre la richesse du langage. La négociation, le marchandage ne sont pas des dialogues. De la discussion jaillit la lumière. Je restreins le vrai dialogue à quelque chose de constructif qui permet de comprendre mieux. L'écoute n'est pas passive, je passe au filtre de ma personnalité.
- Christian de B. : Le dialogue est une réaction au quotidien de la fonction symbolique. Les échanges marchands supposent la fonction symbolique.
- Pascal : Le vrai dialogue est une thérapie du rapport humain, non de la personnalité. La raison profonde, la racine du conflit... l'autre et moi c'est la même chose. La frontière est une opposition, une contradiction. La question du conditionnement humain : nous sommes entraînés à parler en termes d'opposition, de désaccor ou accord. On n'arrive pas à un consensus sur la vérité, elle est ce qu'elle est, on n'a pas à se mettre d'accord, elle se découvre, s'approfondit. Les politiciens cherchent un consensus.
(...)
- Serge : Est-ce que n'importe quel sujet peut être philosophique ?
- Claudine : Dialoguer c'est travailler sur soi.
- Dimitri : On n'est pas au centre du monde, il n'y a pas que les philosophes grecs.
(...)
- Marina : Le dialogue c'est quand on est en empathie avec l'autre.
- Colette : Le dialogue c'est voir avec les yeux d'autrui.
- Pascal : Un aveugle avec des lunettes ne voit pas.
(...)