Café philo du jeudi 15 novembre 2001 au Courant d'Air à Marseille (rue de la Coutellerie, entre le vieux port et l rue de la République)
Sujet : Le contenant et le contenu
Il y avait un gourou considéré par tout le monde
comme la sagesse incarnée.
Chaque jour il discourait sur divers aspects de
la vie spirituelle et il était évident pour tout le
monde que personne n'avait jamais surpassé cet
homme en ce qui concernait la variété, la
profondeur et le caractère séduisant de son
enseignement.
Ses disciples ne cessaient de le questionner sur la source d'où il tirait cette inépuisable provision de sagesse.
Il leur dit qu'elle était toute consignbée dans un
livre dont ils hériteraient à sa mort.
Le lendemain de sa mort, les disciples
trouvèrent le livre exactement à l'endroit où il
avait dit qu'il serait.
Il n'y avait qu'une page dans ce livre et qu'une
phrase écrite sur cette page : "Comprenez la
différence entre le contenant et le contenu et la
source de la Sagesse s'offrira à vous."
Anthony de Mello.
Résumé du débat
- On confond souvenbt le contenant et le contenu, par exemple quand on dit "boire un verre".
Le verbe s'est fait chair.
- Il y a la forme et le fond, le plein et le vide, le geste et l'intention.
- Jacques : Il y a aussi le cerveau et l'esprit. L'esprit n'est-il que le produit du fonctionnement du cerveau ou y a-t-il quelque chose de plus, d'immatériel ?
- Platon a accordé une réalité aux idées.
Selon Alain Connes il y a une réalité mathématique, on n'invente pas, on découvre.
- Il y a l'être et le paraître.
- Il y a un programme de création de texte aléatoire qui construit un texte qui ne veut rien dire. J'ai envoyé un texte créé par ce programme sur un forum de discussion. On m'a répondu : "C'est trop intelligent pour nous" ! On est dans la croyance.
- Les mathématiques sont complètement virtuelles.
- Dans toute forme il y a un fond, un jugement extérieur.
- La matière est-elle réelle ou virtuelle ? On pêut la considérer comme une construction mentale qui rend compte de nos perceptions.
- En physique, il y a des particules virtuelles.
- Quand on est au cinéma, on est complètement plongé dans le film. Pour certains, la réalité est le film, et ils allument l'interrupteur...
- C'est pas donné d'avance.
- On met une représentation sur le représentation de la matière.
- Séparer contenant et contenu est une faille. Dans la réalité, il n'y a pas de vide. Il n'y aurait pas de musique s'il n'y avait pas de vide entre les notes.
- Schwaller de Lubicks écrit dans Her-Bak disciple :
- Qu'est-ce que tu vois ?
- Une colonnade.
- C'est tout ce que tu vois ?
- Oui, des colonnes régulièremebt espacées.
- Tu oublies le vide entre les colonnes. S'il n'y avait pas ce vide, ce serait un mur.
- Gérard : Le monde des rêves est totalement...
- Incohérent
- Gérard : Non, il a sa cohérence cachée. Cette décohérence nous régénère et aide à la résolution des problèmes quotidiens.
- Si on n'était pas cultivé, on ne vivrait que pour satisfaire ses besoins biologiques. La conscience n'existe pas. C'est un travail neuronal. Est-ce que tout travail, pensée réside dans le cerveau ?
- Le contenant est aussi organisation, désir, adaptabilité.
- Le contenant, souvent, on ne sait pas le traduire.
- Le discours s'appuie sur des référents. C'est la différence contenu - contenant.
- C'est comme les trous noirs, on ne les voit pas directement, on les voit grâce aux étoiles qui sont derrière, qui ne sont plus visibles.
- Vincenot raconte, dans "Les étoiles de Compostelle", l'histoire d'un vieil homme qui emmène avec lui un jeune garçon à Saint Jacques de Compostelle. Après de nombreuses péripéties, ils arrivent à destination, et là il n'y a rien de spécial à voir. Ils rentrent. Le jeune garçon dit que ce voyage n'a servi à rien, il n'y avait rien à Saint Jacques de Compostelle. Le vieil homme lui répond que c'est le voyage qui est important. Il y a confusion entre le but et le moyen, entre le contenant et le contenu.
- Ce n'est pas le voyage qui est important, c'est le sens du voyage.
- Il y a aussi "L'alchimiste" de Coelho.
- Le scepticisme par rapport à une croyance débouche sur une autre croyance.
- Toujours on a besoin de quelque chose d'autre, d'une autre croyance.
- Un contenu peut aussi être contenant d'un autre contenu. Les contenus peuvent être imbriqués comme des poupées gigognes.
- Jacques : La conscience est la perception d'un extérieur par un intérieur, d'un contenant par un contenu. Elle est peut-être produite par une imbrication infinie de niveaux d'organisation de la matière : corps, cerveau, neurone, molécule, atome, particule, quark... Ca pourrait continuer à l'infini avec des lois physiques toujours nouvelles. L'homme ne serait pas une machine finie. Quel que soit le niveau considéré, il y aurait toujours un intérieur pour percevoir un extérieur.
- Les mathématiques ressemblent à la religion, il y a de la rigueur, des vérités considérées comme absolues, sacrées.
- Jacques : La différence est qu'en religion il y a des vérités qui ne sont pas évidentes et qu'on doit admettre sans comprendre, alors qu'en mathématiques on cherche des axiomes qui soient les plus évidents possible.
- Ce qui est simple est faux, ce qui est compliqué est inutilisable. Il faut trouver un juste milieu.
- Je voudrais enlever le mot "con" : le tenu et le tenant, le tenant et l'aboutissant.
- La matière est divisible à l'infini, mais les particules élémentaires d'énergie sont non divisibles.
- On peut imaginer l'infini mais pas l'indéfini.
- L'essence est ce qui met en mouvement toutes ces forces. Le contenant est le moteur. Le contenu est l'ustensile qui les met en action.
- Il y a la subjectivité et l'objectivité.
- Le but non avoué est la compréhension.
- La question du référent.
- Le contenu, l'objectivité est inconnaissable. Nous ne connaissons que le contenant, la subjectivité.
- Quand on voit un homme derrière des barreaux, est-ce qu'il est dans la cage ou dehors ?
- Dans la caverne de Platon, le réel c'est les ombres.
- Je ne comprends pas la différence entre contenant et contenu. Je ne vois pas la problématique.
- Jacques : Ma première idée par rapport à ce texte était d'assocvier le contenant au cerveau et le contenu à l'esprit. a problématique est que si on les confond, on prend l'esprit pour le cerveau qui est une machine régie par des lois physiques. L'erreur, si c'en est une, est catastrophique : si on pense que nos actions sont déterminées mécaniquement l'éthique s'effondre : quel sens ça a de se demander ce qu'on doit faire pour réaliser ce qu'on considère comme bien si on n'a pas vraiment le choix de ce qu'on fait ? Par contre l'erreur inverse n'a aucune importance : si on est des machines et qu'oin croit qu'on est libre on est de toute façon déterminé à croire qu'on est libre. On a donc tout intérêt à faire le pari pascalien de la liberté de l'esprit par rapport au déterminisme de la matière, même si la science peut nous donner la vision d'un esprit émergrant de la matière et soumis à ses lois.
- Ce qui habite notre corps est l'âme. L'âme suscite l'esprit. L'esprit décrypte l'âme.
- Certains qui sont dans une bagnole se croient libres alors qu'ils sont enfermés.
- L'esprit séparé du cerveau, cette idée ne me plait pas. L'ordinateur qui transmet est fait de neurones, l'esprit est dépendant des neurones.
- Il y a aussi l'opposition entre forme et fonction.
- La vacuité c'est laisser de la place. Je deviens contenant. Quel contenui va rentrer ?